« Mourir pour des idées, c’est bien beau mais lesquelles ?
Et comme toutes sont entre elles ressemblantes,
Quand il les voit venir, avec leur gros drapeau,
Le sage, en hésitant, tourne autour du tombeau .
Mourrons pour des idées d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente ».
J’adore Brassens, et cette chanson en particulier, mais que les idées « soient toutes entre elles ressemblantes », pas sûr : Gandhi, Mandela et beaucoup d’autres, ont vécu pour la paix; et ils auraient pu aussi mourir pour la paix; d’ailleurs Gandhi l’a fait, finalement. (mais la paix, l’Amour, ne sont pas vraiment des idées, en fait, c’est d’une autre nature.)
A part cela, oui, dès qu’il y a des « gros drapeaux », toutes les idées se ressemblent :
« Nous sommes les bons, ceux d’en face sont les mauvais; s’ils disparaissent, tout ira bien. »
Connaissez-vous UNE révolution violente qui ait produit une réelle amélioration ?
Pendant la révolution française, on a guillotiné un roi, puis on a eu deux empereurs. Et la Terreur en prime.
Au cours de la révolution russe, l’assassinat du tsar et de sa famille a laissé place à Lénine, Staline, et des années de dictatures.
En Chine : plus d’empereurs non plus, mais Mao a-t-il transformé l’ « Empire du Milieu » en un endroit de rêve ? Pas sûr.
J’ai posé la question à de nombreuses personnes depuis des mois, je n’ai eu aucune réponse satisfaisante. Si, une seule peut-être : mai 68.
Effectivement, l’atmosphère s’est un peu allégée, un vent de joie et de liberté a réellement soufflé pendant les quelques années qui l’ont suivi. (Mais cinq ans plus tard, tout tournait mal au niveau des banques, ce qui est à l’origine de la dette qui plombe maintenant tous les peuples du monde ou presque. Manipulation délibérée pendant l’euphorie de l’après-68, ou erreur de stratégie ?)
juillet 2024 : Quand j’ai écrit cet article, en 2019, je me posais naïvement la question « Manipulation délibérée pendant l’euphorie de l’après-68, ou erreur de stratégie ? »
Je m’y réponds maintenant à contrecoeur : l’un des buts de mai 68 était une manipulation financière, un autre était de faire tomber De Gaulle parce qu’il refusait l’OTAN (voir : Le D-day : une manipulation de plus).
D’où viennent les améliorations (s’il y en a), après une révolution ?
D’où est venue cette atmosphère plus heureuse, suite à mai 68 ? Des pavés jetés sur les CRS, ou des échanges qui se sont produits entre des gens qui ne se connaissaient pas ?
Je penche évidemment pour la deuxième solution : il y a eu une (relative) fraternisation entre les ouvriers et les étudiants, entre des personnes de différents milieux. Et beaucoup de discussions, de débats d’idées, de remise en question d’idées toutes faites…
C’est le moment où on écrivait « Interdit d’interdire », et : « C’est des brumes de l’utopie qu’émergent les formes de la réalité ».
Plutôt que les pavés, ce qui a été bénéfique, c’est surtout la convivialité, la communication, qui a eu lieu pendant ces quelques mois. Et aussi le droit au Rêve, à la réflexion, à la pensée personnelle, à l’exploration de l’immensité des possibles.
Tout cela a produit certainement aussi un grand changement au niveau énergétique, un allègement perceptible de l’égrégore collectif, créant ainsi, pour quelques temps, un cercle vertueux : plus les gens sont heureux, plus ils se sentent respectés et écoutés, plus ils ont envie d’écouter les autres et de les respecter (en tant qu’êtres humains).
Parallèlement à cela, il est possible que l’excitation des batailles de rues aient contribué à donner plus de confiance en eux à certains, qu’elle ait réveillé en eux des forces de Vie.
Mais ne pouvait-on pas arriver autrement à ce résultat ?
La Vie est tellement puissante en nous tous, elle ne demande qu’à trouver des moyens de se manifester : pourquoi ne l’exprimer qu’à travers la violence ? On peut trouver mieux.
« Sous les pavés, la plage ». Ce slogan de mai 68 m’a un peu fait rêver, il y a longtemps, bien qu’il suscitait déjà en moi de vagues interrogations.
Maintenant, l’image qui me vient, c’est : sous les pavés, une plage… ensanglantée.
Je laisse maintenant la place à quelqu’un qui exprimait le même point de vue, en s’accompagnant de sa célèbre guitare :
Mourir pour des idées (Brassens)
Les paroles de « Mourir pour des idées » proviennent du blog : http://www.brassens-cahierdechanson.fr/OEUVRES/CHANSONS/mourir.html. C’est moi qui ai mis certains passages en caractères gras.
Mourir pour des idées, l’idée est excellente .
Moi j’ai failli mourir de ne l’avoir pas eu .
Car tous ceux qui l’avaient, multitude accablante,
En hurlant à la mort me sont tombés dessus .
Ils ont su me convaincre et ma muse insolente,
Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi
Avec un soupçon de réserve toutefois :
Mourrons pour des idées d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente .
Jugeant qu’il n’y a pas péril en la demeure,
Allons vers l’autre monde en flânant en chemin
Car, à forcer l’allure, il arrive qu’on meure
Pour des idées n’ayant plus cours le lendemain .
Or, s’il est une chose amère, désolante,
En rendant l’âme à Dieu c’est bien de constater
Qu’on a fait fausse rout’, qu’on s’est trompé d’idée,
Mourrons pour des idé’s d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente .
Les saint jean bouche d’or qui prêchent le martyre,
Le plus souvent, d’ailleurs, s’attardent ici-bas .
Mourir pour des idées, c’est le cas de le dire,
C’est leur raison de vivre, ils ne s’en privent pas .
Dans presque tous les camps on en voit qui supplantent
Bientôt Mathusalem dans la longévité .
J’en conclus qu’ils doivent se dire, en aparté :
« Mourrons pour des idé’s d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente . »
Des idé’s réclamant le fameux sacrifice,
Les sectes de tout poil en offrent des séquelles,
Et la question se pose aux victimes novices :
Mourir pour des idé’s, c’est bien beau mais lesquelles ?
Et comme toutes sont entre elles ressemblantes,
Quand il les voit venir, avec leur gros drapeau,
Le sage, en hésitant, tourne autour du tombeau .
Mourrons pour des idé’s d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente .
Encor s’il suffisait de quelques hécatombes
Pour qu’enfin tout changeât, qu’enfin tout s’arrangeât !
Depuis tant de « grands soirs » que tant de têtes tombent,
Au paradis sur terre on y serait déjà .
Mais l’âge d’or sans cesse est remis aux calendes,
Les dieux ont toujours soif, n’en ont jamais assez,
Et c’est la mort, la mort toujours recommencé’ …
Mourrons pour des idé’s d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente .
O vous, les boutefeux, ô vous les bons apôtres,
Mourez donc les premiers, nous vous cédons le pas .
Mais de grâce, morbleu ! laissez vivre les autres !
La vie est à peu près leur seul luxe ici bas ;
Car, enfin, la Camarde est assez vigilante,
Elle n’a pas besoin qu’on lui tienne la faux .
Plus de danse macabre autour des échafauds !
Mourrons pour des idé’s d’accord, mais de mort lente,
D’accord, mais de mort lente .
Pour ma part, je ne pense absolument pas que la violence puisse apporter une amélioration quelconque. Quand certains usent de violence, ceux qui la subissent n’y voit aucun bien.
L’amélioration naît du partage, du respect de l’avis et des sentiments des autres. Notre vie est plus belle, non parce qu’on reçoit, mais parce qu’on donne et fait du bien aux autres.
On est bien d’accord 🙂
Mais tant de gens sont encore persuadés que ça peut résoudre ce qui va mal… Depuis 2012, ça commence à changer, j’espère.
La violence, même si elle résulte parfois d’une réelle et indiscutable détresse est un aveu d’impuissance ; la solution ultime au « on a tout essayé »; en tout cas, on a essayé toutes les solutions que l’on connaît.
Les auteurs de violences, animés de colères de toutes sortes, ne disposent peut-être pas d’autres outils pour exprimer leurs émotions, leurs douleurs. Chacun utilise les outils qu’il a, ceux dont il dispose, qu’il connaît.
Je pense souvent au petit enfant qui commence à parler, bafouille, s’agace et crie, faute de pouvoir exprimer ou obtenir ce qu’il souhaite. Sauf que, nous ne sommes plus au stade de la colère du petit bonhomme qui commence à parler. Mais les mécanismes me semblent identiques. Toutefois, on peut supposer que l’enfant apprendra à s’exprimer et les choses devraient s’arranger pour lui. En revanche, ceux qui usent de violence…. Pas sûre que l’issue soit enfin rose une fois la violence exprimée, surtout qu’elle n’aura sans doute pas permis de cautériser les blessures. La violence recommencera donc….?
Bonjour Léa
Je suis bien d’accord avec vous, la violence résulte d’une détresse et d’un sentiment d’impuissance. Et quand on n’a pas envie de voir de près cette détresse (trop douloureuse) ni ce sentiment d’impuissance (humiliant et effrayant), on finit par aimer sa propre colère : qui est, comme vous dites, la seule solution qu’on a trouvé. Et surtout, trouver plein de moyens pour la « justifier ».
Je dis « on » parce que même sans être des casseurs, nous avons tous énormément de colères en nous : tout est miroir, mon hypothèse est que les événements actuels nous servent à nettoyer cette haine que nous transportons tous de vie en vie. Je m’en suis particulièrement rendue compte quand j’ai créé ce tapping : https://www.jaime-left.com/2019/01/03/effet-miroir-mepris/(d'abord pour me calmer !). L’EFT aide vraiment pour cela, je vais publier le plus possible de tappings sur ce thème. C’est « ma part du colibri ».
Exactement ! D’ailleurs, si les attitudes violentes nous insurgent, c’est bien le signe que çà nous « gratte » quelque part. Ça appuie là où çà nous fait mal… Nous pourrions presque leur dire merci de nous permettre de faire ce travail sur nous-mêmes… Enfin….disons que chaque chose a un sens et sa raison d’être. Donc au boulot, les colibris que nous sommes n’ont plus qu’à tapoter pour s’apaiser…et apaiser notre entourage !
Waaa ! ça fait du bien de voir que nous sommes de plus en plus nombreux à voir les choses ainsi. Nous arriverons bientôt au seuil où des milliers de colibris réussiront à éteindre l’incendie émotionnel qui dévore l’humanité depuis tant de siècles. en tout cas je le souhaite de tout mon coeur.