J’ai parlé rapidement dans plusieurs articles et vidéos des « pauses CNV », mais je me suis aperçue qu’il fallait expliquer davantage quand et comment les faire.
Je rappelle de quoi il s’agit.
Qu’est-ce qu’une « pause CNV » ?
Je ne suis pas sûre que ce terme appartienne au vocabulaire « officiel » de la CNV (Communication Non-Violente) mais il me semble être tout à fait dans son état d’esprit.
Dans une discussion qui se passe mal, le cerveau reptilien passe aux commandes, parce que chacun se croit attaqué. Or ce cerveau, le plus ancien dans sa formation, n’a que 3 modes de réaction à sa disposition : la fuite, l’attaque, ou le fait de faire le mort.
On imagine très bien ce que cela donne dans le reste du monde animal ; en ce qui concerne les humains actuels, il faut un peu transposer (c’est expliqué plus en détail dans cet article).
Quand les dinosaures et les bébés passent aux commandes
Si le ton monte, c’est que les personnes concernées sont en « mode attaque » (ceux qui n’interviennent pas sont en mode « fuite » ou « je fais le mort », ce qui n’aide pas non plus; certains peut-être, heureusement, observent avec bienveillance, cherchent une façon de calmer le jeu, envoient de l’énergie du Coeur, eh oui, ça existe aussi, et même de plus en plus…).
Quand les participants sont en mode attaque, chacun va tenter de déséquilibrer l’adversaire en le culpabilisant et le menaçant plus ou moins indirectement. Tout cela avec des arguments fournis par le cerveau limbique, qui contient nos programmations les plus anciennes, celles des parties de nous qui ont 2 ans, 3 ans, ou sont au stade foetal.
Quand on est énervé, le cerveau émotionnel est aux commandes, il passe en procédure « urgence » : il inhibe alors le cerveau rationnel. Et souvent aussi l’intuition (donc, le Coeur).
Alors, on imagine le niveau de discussion ! L’agressivité des tyrannosaures, et le niveau de réflexion d’une classe de maternelle.
Dans cette situation, la seule solution, c’est « Courage, fuyons ! ».
Exemple : un couple
On va prendre l’exemple d’un couple, chez qui le ton commence à monter. (voir aussi l’article : « Disputes dans un couple : des solutions« ). Ce qu’on va dire est souvent adaptable à d’autres personnes.
La pause CNV va consister à prendre une distance raisonnable, et à ne reprendre la discussion que quand les deux se sentent capables de discuter de façon constructive.
Mais comment la faire le plus efficacement possible ?
Il est très utile de la préparer, en expliquant à son conjoint en quoi elle consiste, dans un moment calme. Puis, au moment où les cerveaux émotionnels risquent d’entrer en ébullition, d’arrêter calmement la discussion, que l’autre soit d’accord ou non. Voici une check-list, la plus pratico-pratique possible.
QUAND préparer les futures pauses CNV ?
Il est indispensable que ce soit dans un moment calme, par exemple un jour ou deux après une dispute. Un moment où vous ne boudez plus, où le tyrannosaure de l’un et de l’autre fait la sieste.
- Si votre conjoint est fâché avec le développement personnel, évitez le mot « CNV » : vous avez juste entendu parler « quelque part » du cerveau reptilien et des bêtises qu’il est capable de dire et de faire, quand il est bien énervé.
- Ne remettez pas en scène l’une de vos disputes en particulier : ce serait le « meilleur » moyen de la recommencer. Parce que vous savez que le cerveau ne fait pas la différence entre l’imagination et la réalité.
- Parlez de conflits en général, en refusant de vous centrer sur l’une de vos disputes (je sais : j’insiste lourdement), en tout cas, pas en début d’explication. Les manifestations à l’heure actuelle en France peuvent être une base de discussion (ou pas). En effet, quand deux camps sont face à face, on arrive très vite aux « combats de cerveaux reptiliens ».
J’ai participé au tout début au mouvement des Gilets Jaunes, j’explique ici ce que j’y recherchais (« Gilets Jaunes : pouvoir d’achat, ou pouvoir d’être heureux ? »). Mais, de ce que j’en ai vu (je ne généralise rien), ce mouvement a de plus en plus tourné à la colère, donc à l’émotionnel, et s’est éloigné du désir de réflexion et de fraternité. En termes de CNV, je comprends complètement les besoins exprimés, mais je ne partage plus les stratégies qu’ils emploient pour les satisfaire.
La discussion peut aussi démarrer à partir d’un film, par exemple (sans l’annoncer avec « vos gros sabots », dans le genre : « Je tiens à ce qu’on regarde ce film parce qu’on a un problème de couple »).
Que dire au cours de cette discussion ?
- Avant tout, affirmez votre intention : « J’ai vu une idée qui pourrait nous aider à mieux nous entendre; parce que quand on se dispute, je suis vraiment malheureuse, parce que je t’aime vraiment /parce que je tiens à ma relation avec toi » (selon ce qui est le plus vrai pour vous sur le moment : quand on passe son temps à se disputer, on ne ressent plus d’amour sur le moment; mais le cerveau rationnel se souvient qu’on préférerait avoir une bonne relation : c’est déjà ça). Il est fondamental d’affirmer votre intention, la ré-affirmer, la ré-ré-ré-affirmer, chaque fois que vous sentirez le moindre petit nuage noir passer entre vous au cours de la discussion.
- Vous faites ou non un petit speech sur le cerveau reptilien et sur le fait de se sentir attaqué (comme celui du paragraphe ci-dessus). Mais en tout cas, vous insistez sur le fait que : Quand tout part en vrille, on dit n’importe quoi, l’un et l’autre. Et les deux se sentent mal après (là, votre partenaire va probablement reconnaître que, oui, lui/elle aussi, ne se sent pas très bien après tout ça.)
Donc il serait très utile, pour vous deux, et pour les enfants s’il y en a, de savoir arrêter très vite l’incendie, dès la première petite étincelle. - Après tout cela, vous pouvez parler de « faire une pause de quelques minutes » en redisant les buts : vous entendre mieux, et arrêter les incendies dès leur début, en résumé, être plus heureux l’un et l’autre. Logiquement, il / elle sera d’accord sur le principe…
Vous pourrez expliquer en quoi consiste cette fameuse « pause ». On en parle au paragraphe suivant.
C’est important que vous vous mettiez d’accord sur un nom pour désigner cette « pause CNV », ou « pause de quelques minutes », ou « pause bonne entente »… Parce que quand un incendie se déclare, on n’a pas le temps de faire des discours,
Comment annoncer une pause CNV quand il y a « risque d’incendie » ? (la première fois)
Vous pouvez dire la première fois quelque chose comme : « Là, je sens que je m’énerve de plus en plus, et que je risque de dire des choses pas aimables. Je n’ai pas envie de te dire des choses blessantes.
Alors comme je t’aime / je tiens vraiment à ce qu’on s’entende bien / notre relation est très importante pour moi (l’un des trois, selon ce que vous ressentez le plus sur le moment), je tiens absolument à ce qu’on fasse une « pause de quelques minutes » (le nom que vous avez choisi ensemble); tu te souviens de ce qu’on a dit l’autre jour, pour éteindre les débuts d’incendie ? . On reprendra la discussion tout à l’heure, quand on pourra tous les deux parler plus calmement ».
Quelques remarques :
- « je m’énerve de plus en plus, et que je risque de dire des choses pas aimables » : même si c’est lui qui est clairement en train de « déraper », il est bien entendu (pour préserver son cerveau émotionnel), qu’il est un ange de douceur, et que c’est seulement vous qui avez besoin d’une pause… pour préserver votre relation, parce que vous y tenez beaucoup, etc etc. Tout cela pour ne pas risquer de verser de l’huile sur le feu que vous essayez d’éteindre.
- S’il vous dit « C’est une fuite, tu veux éviter la discussion » : vous savez très bien que ce n’est pas vrai. Vous voulez éviter un « combat de dinosaures », une « ébullition de cerveaux reptiliens », pas une discussion bienveillante et constructive. Vous n’êtes simplement pas en état, maintenant, d’avoir ce niveau de discussion. Donc : « ciao mon chéri, à tout à l’heure ».
- Vous changez de pièce, même s’il n’est pas d’accord. Parce que s’il « argumente » encore, ce sera avec son cerveau reptilien, donc ça ne fera qu’aggraver les choses. Il ne va pas enfoncer la porte pour vous taper dessus ? Sinon, le problème ne relève plus de cet article, il faut absolument vous faire aider à l’extérieur.
Et si vous savez que ça ne va pas se produire, mais que la situation réveille en vous des vieilles mémoires, ce tapping peut vous servir à en effacer quelques-unes : « EFT Femmes battues : ancêtres et / ou vie actuelle« .
Que faire pendant les « pauses CNV » ?
Vous changer les idées, bien sûr. Faire une balade dans la nature, lire mon blog 😉, ou un ouvrage de développement personnel. Quelque chose qui vous rappelle que ce n’est qu’une partie de vous qui est en conflit (provisoire) avec une partie de l’autre personne. Et qu’on est tous miroirs les uns des autres.
Aussi, bien sûr : du « secourisme émotionnel (avec un mini-protocole EFT« , et / ou un protocole EFT un peu plus long comme ceux-là.
- « EFT Quand on n’est pas en état de faire de la CNV » (il sera publié le 21 février)
- ou des protocoles sur la colère, par exemple : « EFT pour arrêter d’être en colère« .
Aux disputes suivantes
Je vous souhaite évidemment de ne plus en avoir, mais … au cas où 😉..
C’est vraiment puissant, les pauses CNV : lisez la suite.
- Aux disputes suivantes, ça ira plus vite : vous n’aurez pas à refaire le petit speech ci-dessus. Seulement quelque chose comme « Là, on commence à dire n’importe quoi. Alors, je t’aime, je tiens à notre relation, mais stop : pause CNV. Bisous, à tout à l’heure (ces derniers mots : juste avant de fermer la porte de la pièce où vous êtes partie; fin de discussion).
Les mots que j’ai écrit en gras sont indispensables pour le rassurer : vous faites tout cela POUR améliorer votre relation, pas pour le mettre au coin parce qu’il serait un méchant garçon (eh oui, au moindre clash, on retombe dans la zone de l’enfant grondé). - Et ça deviendra de plus en plus simple.
J’ai vraiment expérimenté : quand j’ai commencé à m’intéresser à la CNV, j’ai bien dû constater que je n’étais pas toujours en état d’en faire : quelquefois, l’énervement monte, et la CNV… on oublie même qu’elle existe.
J’ai parlé de « pauses CNV » à mon mari, Nous avons expérimenté cela dans des petits « moments de grincement », et au bout de 4 ou 5 fois, nous n’avons même pas eu besoin de dire « Stop, pause CNV ».
C’est maintenant, en écrivant cet article, que j’y réfléchis : je suppose qu’en faisant ces pauses, on a vraiment appris à reconnaître les « débuts d’incendie », et on a intégré tous les deux la conscience du risque de dérapage. En conséquence, on arrête au bon moment, avant même de nous en apercevoir ; yesss !